
Des suivis des populations de syrphes à l’automne : mais pourquoi ?
Une des originalités du projet ARENA est de réaliser des suivis d’auxiliaires et de ravageurs également à l’automne. En effet si de nombreuses études ont porté sur le suivi de ces organismes au printemps, il manque aujourd’hui des connaissances sur les populations actives à l’automne. Pourtant, le rôle des ennemis naturels dans la régulation des bio-agresseurs ne serait pas négligeable. Une étude de Raymond et al. sortie en 2014 a par exemple montré que les populations de syrphes présentes durant l’automne permettraient de limiter le développement des pucerons au printemps suivant.
Le rôle des syrphes
Les différentes espèces de syrphes peuvent être classées en trois catégories selon le régime alimentaire de leur larve : les espèces phytophages, les espèces microphages et les espèces zoophages. Ces dernières représentent 40% des espèces que l’on retrouve en France et se nourrissent principalement de pucerons.
Lorsque la mauvaise saison arrive, les syrphes optent pour différentes stratégies. Pour certaines espèces la femelle fécondée reste sur place, pour d’autres les individus vont migrer vers des régions plus tempérées et enfin certaines espèces vont passer l’hiver sous forme de larve ou de pupe dans le sol. D’après Syrph the net, la base de données des syrphes européens, la majorité des espèces aphidiphages vole jusqu’à mi-novembre dans l’ouest de la France. Les femelles pondent alors leurs œufs sur les colonies de pucerons qui viennent de s’installer sur les cultures d’hiver, permettant de contribuer à leur régulation. L’enjeu de cette régulation est de limiter les dégâts des pucerons vecteurs de la Jaunisse Nanisante de l’Orge à cette saison (alors que les dégâts au printemps ont lieu directement par l’action des pucerons sur les cultures). Les espèces dont les femelles passent l’hiver sur place contribuent à une régulation précoce des pucerons au printemps.
Des syrphes présents à l’automne sur le réseau de parcelles ARENA
Ce graphique synthétise les résultats des relevés réalisés pour ARENA à l’automne 2017. Il représente l’abondance moyenne de syrphes présents dans les cuvettes jaunes entre les semaines 40 et 50, c’est-à-dire entre début octobre et mi-décembre, sur l’ensemble du réseau de parcelles du projet. Bien que moins nombreux qu’au printemps, les syrphes sont présents tout au long de l’automne et sont plus abondants en novembre.
Pour aller plus loin
D’après les résultats du CASDAR Entomophages qui s’est déroulé de 2009 à 2011 et qui a suivi notamment les populations de syrphes dans trois régions (Picardie, Rhône-Alpes et Centre) ce sont les mêmes espèces qui sont majoritairement abondantes à l’automne et au printemps, et dans le même ordre d’abondance décroissante : Sphaerophoria scripta, Eupeodes corollae, Melanostoma mellinuum et Episyrphus balteatus.
Ces espèces sont toutes aphidiphages et les espèces Sphaerophoia scripta, Episyrphus balteatus et Eupoedes corollae passent l’hiver sous forme adulte, suggérant une régulation des pucerons tôt au printemps tandis que Melanostoma mellinum le passe sous forme larvaire indiquant une possible régulation des pucerons à l’automne. D’après une étude réalisée par Sarthou et al. en 2005, l’espèce Sphaerophoria scripta pourrait même avoir les trois stratégies d’hivernation. Cette espèce, qui est l’espèce majoritaire des relevés d’automne pourrait donc à la fois avoir un rôle dans la régulation des colonies de pucerons vecteurs de la JNO et pourrait réguler les colonies s’établissant à la sortie de l’hiver.
Photo : Eupeodes corollae – Magaly Lahély – CASDAR Entomophages
Contact: Marinne Leclercq, Arvalis Institut du Végétal